Air frais. Temps gris. Arbres morts. Tout était réuni pour rendre le cimetière le moins accueillant possible. C'est pourtant là bas que je m’apprête à partir, avec mon sac et une veste assez épaisse. Je ressers une dernière fois mon foulard autour du cou et pars combattre les températures plutôt fraîches. Une fois dehors, je marche lentement en profitant du vent qui me pousse et me souffle dans les oreilles. Mes pas résonnent sur le gravier et l'espace autour de moi est silencieux. Quand j'arrive au cimetière, terre de repos des morts, je m'assois sur un banc de pierre dans un mutisme respectueux. Mes mains se frottent l'une contre l'autre pour produire de la chaleur et par moment, je les aide en soufflant légèrement dessus.

" Ca me fais tout drole d'etre ici "

En effet, cela devait faire maintenant sept ans que je n'avais pas remis les pieds dans un endroit de ce genre. Pourtant je m'y sens plutôt bien, c'est calme et ainsi parfait pour ceux qui recherchent la tranquillité. Pourquoi un tel endroit aurait une réputation si sombre ? Je ne sais pas.
Au bout d'une dizaine de minute, je décide finalement de sortir un calepin, un crayon et je commence à écrire quelques gammes. Les notes s’enchaînent naturellement sur le papier. Je regrette de ne pas avoir emmené ma guitare, j’aurais pu jouer une mélodie pour ces êtres disparus.
Finalement je trouve ma composition plutôt banale et, avec une expression un peu déçue, je pose mon carnet à côté de moi.

Dimanche, je me lève bien tard et mets le nez à la fenêtre de ma chambre. Il fait peut-être un peu froid pour la plupart des gens, mais j'apprécie le contact du vent sur mon visage. Sifflotant, j'attrape une veste et décide de sortir faire un tour. Je n'ai pas de destination précise, mais j'aime bien errer en me laissant guider par mes envies. Prise de gargouillements, je me dirige vers le centre ville et achète un croissant, que je grignote en marchant. Machinalement, je passe devant le cimetière et regarde à l'intérieur. Petite, je me demandais souvent si je marchais sur les personnes enterrés des mètres plus bas quand j'y allais. Ma mère était-elle ...?
Ces journées que l'école n'occupait pas, je les passais à me promener et souvent, ces moments me rendaient bien mélancolique... Un sentiment que je repoussais loin de mon esprit les jours de cours.
Sans réfléchir, je m'engageais dans le cimetière. L'ambiance était paisible et ... sereine. Loin de l'endroit effrayant et lugubre que retranscrivaient les films. Mais j'étais loin de me douter que j'allais trouver une personne ici. A quelques mètres de moi se tenait une jeune fille, un carnet et un crayon à la main. Devais-je continuer mon chemin? Je pouvais comprendre les personnes qui préféraient rester seule parfois. Je la vois qui pose son carnet et hésitante, j'ose un raclement de gorge.

- Umm... Bonjour?

C'était un dimanche, et je profitais de cette journée pour m'entrainer à voler. Je sortit dehors et alla dans un endroit tranquille à l’abri des regards. Je n'aime pas être observée, étant timide et gênée. Je fis apparaitre mes ailes blanches, laissant tomber quelques plumes, et je me les réveillaient un peu en les agitant doucement. Puis je les agitais de plus en plus vite, et enfin mes pieds se décrochèrent de la terre ferme, me voilà dans les airs. Mon point faible, l'atterrissage. C'était plutôt ça que je devait expérimenter. Alors je chercha un endroit où je pourrais me poser sans faire de dégâts. Je plana assez haut pour avoir une plus grande vue, si haut que je pouvais traverser les nuages, si doux. J'en oubliais mon entrainement et ma concentration. J'étais en extase devant ces beaux nuages blancs. Je batifolais encore, en riant de bon cœur. C'était si amusant, que je ne fit plus attention à ce que je faisais. Je me laissa distraire et je lâcha subitement les muscles de mes ailes, ce qui me fit tomber en chute libre. Je me rattrapa un peu en déployant mes ailes, ce qui amortit légèrement. La chute ne sera donc pas si terrible, mais je ferma les yeux et me mis à crier. Et enfin, le moment qui avait fait lâcher mon cœur, était arrivée. Je m'écrasa en beauté à plat ventre sur le sol, et un grand bruit résonna. Plus de peur que de mal, je n'étais pas tomber à grande vitesse vu que mes ailes avaient fait parachute. Je releva ma tête en poussant sur mes bras, et en remarquant ma robe blanche sale, j'ai supposé que mon visage devrait être tout crasseux lui aussi.

Je me leva puis épousseta tout ce que je considérait comme salis par la poussière. Puis enfin, je releva la tête pour voir où j'avais atterri, enfin, ou j'avais mal atterri. Puis je vis des tombes, avec de jolies fleurs qui les rendaient plus belles et harmonieuses. J'en conclus que je me trouvais dans un cimetière. Je vis tout ces noms gravés sur de la pierre blanche, c'est triste. Cela me fit penser à ma meilleure amie que je n'avais pas pu sauvée. Un grand moment de nostalgie me fit un peu mal au cœur, mais je me repris en respirant bruyamment. D'ailleurs, ma meilleure amie était enterrée ici, je pourrais en profiter pour venir la voir. Puis je me retourna, et je fut vraiment surprise de voir mon amie Mel', que j'avais rencontré au parc d'attraction, et surtout, en face d'elle se trouvait Leia, une connaissance de ma classe, dont j'avais discuté via avion en papier. Ce souvenir me fit rire légèrement, puis je me demandais ce qu'elle faisait ensemble. Si elle se connaissaient... J'irais voir ma meilleure amie plus tard, là, je vais aller saluer des gens que j'apprécie. Je me mis à sourire, je m'avança vers elles, et leur dit:

"Bonjour, vous deux ! Vous allez bien ? Qu'elle surprise de vous voir ici !"

Je les salua de la main, et je me demandais encore si elle m'avait vu tomber comme une cruche sur le sol. Je rougis, c'était gênant. Je craignais alors leurs moqueries, j'étais bien la seule Ananta à ne pas savoir atterrir correctement. Je lâcha un sourire crispé, et passa ma main dans mes cheveux, geste que je regrettais presque immédiatement...

A peine avais-je salué la jeune fille en face de moi qu'un grand bruit sourd accapara mon attention. Je me retournais pour connaitre la source du bruit et vis une Ananta, face contre terre. Curieuse, je m'approchais d'un pas en penchant mon corps dans tous les sens afin de voir le visage de la personne.
Je fus surprise de découvrir Lolitta, ma camarade de classe, qui s'approcha de nous en lançant un salut chaleureux. Je lachais un souffle, soulagée à l'idée qu'apparemment, elle ne s’était pas faite mal. Et bizarrement, toute sa confiance s'envola et elle parut mal à l'aise. Peut être à cause de sa chute? Il était vrai qu'on ne croisait pas une Ananta qui ne savait pas descendre doucement tous les jours.
Je m'approchai d'elle, prise d'un fou rire, et la pris dans mes bras, ignorant allègrement la poussière qui la recouvrait.

- Lolitta! Ca faisait longtemps que je n'avais pas vu un atterrissage comme ça! Tu m'apprendras un de ces quatre?

Je me reculais d'un pas en lui lançant un clin d'oeil. J'avais eu un accès de tendresse pour ma camarade qui avait eu l'air tellement mal après avoir chuté. Sortant un mouchoir en tissu, j'entrepris de l'épousseter. Après quelques gestes, son visage et ses vêtements étaient redevenus propres, et il fallait regarder de près afin de voir les anciennes marques.

- Et voila! Tu brilles maintenant! N'est-ce pas ... Umm...

Je me retournais vers ma nouvelle connaissances dans l'espoir d'obtenir son nom.

Ma petite mélodie me trottait en tête, j'entendais du violon, de la guitare et une voix grave d'homme se mélangeant. Il me fallait embellir et terminer ce que je venais d'entreprendre ! C'est au moment où je voulu ressaisir mon calepin pour un " round two " qu'une jeune fille aux magnifiques cheveux verts vint m'accoster pour me saluer timidement. Je ne pus m’empêcher de la dévisager, elle devait surement être une élève.
Pour la mettre à l'aise je souris à mon tour et je m’apprête à la saluer quand un bruit sourd m'interrompu. Quelle fut ma surprise de découvrir Lolitta, mon amie précédemment rencontrée dans le parc, tombée du ciel.

- Bonjour, vous deux ! Vous allez bien ? Qu'elle surprise de vous voir ici ! dit elle gênée en s'approchant de nous.

J'avais envie de rire de cet évènement inattendu mais ma partie altruiste m'ordonna de l'aider avant. Elle avait l'air de connaitre la jeune fille aux cheveux verts qui venait de me devancer pour l'aider à se remettre. Pendant qu'elle dépoussiérait mon amie, j'entrepris de fouiller dans mon sac ( encore et toujours lui ) pour y chiner un peu d'eau. J'en sortie un bouteille de 50 ml et quelques pansements au cas où Lolitta se serait écorchée.

- Tiens ma grande, c'est pour toi. déclarais-je en lui tendant les affaires.

Puis je me suis tournée vers la jeune fille inconnue pour enfin me présenter.

- Je m'appelle Meldicia, mais appelles moi Mel', et toi comment te nommes tu ?

Je hochais la tête et adressais un sourire à ma nouvelle connaissance.

- Et bien enchantée Mel'! Je suis Leia

A voir la manière dont elle s'était adressé à Lolitta, les deux personnes devaient surement être amies. Je remarquais qu'elle était prévenante et attentionné, mature, tout ce que j'étais bien loin d'être. En admiration, je regardais le banc où Mel' était assise, et remarquais le calepin ouvert, posé à l'envers sur le banc, pour ne pas perdre la page. Intriguée, ma curiosité revint prendre une nouvelle fois le dessus.

- Dis moi, si ce n'est pas trop indiscret, qu'est-ce que tu écris dans ce cahier?

Je l'interrogeais en pointant l'objet du doigt. Puis voulant savoir la manière dont elles s'étaient rencontrées, je demandais à la suite :

- Et alors vous vous connaissez déjà? Comment est-ce que vous vous êtes connues?

Je souriais, bien contente de rencontrer des gens sympathiques dans un endroit qui a priori n'était pas très gai.