Dans le mutisme lourd et oppressant de mon dortoir, je soupire. Il est environ 23 heures, l'internat est calme, la douce lumière de pleine lune éclaire l'intérieur de ma chambre seulement je suis dans l'impossibilité de dormir : foutues insomnies ! J'avais beau me retourner dans tous les sens, compter les moutons, boire du lait, ... Rien a faire. Mes yeux s’obstinaient à rester grands ouverts. Sans vraiment réfléchir, je décide de sortir faire une petite promenade afin de me changer les idées et de me fatiguer un peu. Armée d'une lampe de torche et de mon fidèle sac sur-équipé, je quitte l'internat en silence pour me fondre dans l'obscurité et les ténèbres de la nuit. Que faire ? Où aller ?
Je me laisse guider par la lune, astre luisant de toute beauté. Une légère brume me caresse les pieds et une brise fraîche me pousse dans le dos. Où vont t'ils m'emmener ? J'eus finalement ma réponse au bout d'une dizaine de minutes. J'étais devant le cimetière, lieux de repos des morts. N'importe qui serait repartit aussi sec vers une autre destination, seulement j'eus comme l'impression que cet endroit m’appelait, m'attirait.
Était ce pour cela que j'étais venue ici pieds nus, décoiffée avec une pauvre lumière en main ?
Je n'eus que d'autre choix de rester. Me posant sur un banc de pierre, je dévisage le lieu avec une expression de glace. Tous ces gens, sont ils morts de cause naturelle ? Et si ce n'était pas le cas ?
Je lâche un second soupir en essayant de chasser les fantômes du passé dans ma tête.

Le froid commençait a engourdir mes membres et a chacune de mes respirations un petit nuage de buée se formait. Je tente désespérément de produire un peu de chaleur en frottant mes mains l'une contre l'autre et en les posant sur mes joues. Cela ne fonctionnait pas. Pourquoi n'avais-je pas pris le temps de me couvrir un peu plus ?! Ca m'apprendra à ne pas dormir la nuit.
Vaincue, j'entrelace mes doigts sur mes genoux et médite sous les rayons de la lune. Je fus interrompus dans mes pensées par une voix, faible mais poignante. Quand je pus distinguer les paroles prononcées, j'ai retenu ma respiration et je me suis laissée aller dans ce monde que le poème créait. Un monde sombre où tout n'était que noirceur et ténèbres. Un monde qui n'avait rien a voir avec le mien : Chaleureux et plein de lumière.
Quand la voix s'éteignit, me ramenant brutalement à la réalité, je n'avais qu'une idée en tête : savoir d'où venais cette voix.
Je me suis relevée, précipitamment, puis je me mis a arpenter le cimetière, passant les stelles et autres mausolées. Il ne me fallut pas longtemps pour trouver l’orateur de ce poème. Sur une tombe, un imposant trône taillé à même la roche accueillait une entité macabre : celle ci avait l’apparence d'une Faucheuse. Durant un long moment, je suis demeurée interdite, observant l'individu quelques mètres plus loin. Je n'avais pas peur mais j'hésitais à venir lui parler. Seulement je ne pouvais pas rester là à rien faire non plus. J'ai pris alors la décision la plus stupide de mon existence. Mes pieds nus ont parcouru la distance qui nous séparait puis ils se sont arrêtés juste devant la tombe et je suis restée là, silencieuse, devant la Faucheuse. Étrangement sa présence ne m'étais pas étrangère, nous étions nous déjà rencontrés ?
Sans réponse à cette question, je pose mon regard sur l'individu et attends une quelconque réaction.

L'entité macabre m'interpella d'une voix froide, me demandant ce que je faisais ici. Ce qui me titilla l'esprit fut qu'il connaissait mon espèce, comment avait il deviné ? Durant ma perplexité, la Faucheuse descendit de son trône et avança lentement vers moi. Les pieds ancrés dans le sol, je ne bouge pas. Une petite rafale de vent emporte quelques feuilles mortes et dissipe légèrement la brume. Je regarde l'individu aux ailes osseuses et à la faux aiguisée. Je décide finalement de sourire un peu et de répondre.

- Rien de particulier et puis je ne pense pas que cela te regarde.

Après mettre entendue déclarer cette réponse froide, je l'ai légèrement regretté. Pourquoi m’être montrée si asociale ? Je n'en sais rien. Pour combler le mutisme de la nuit, j'ai enfoncé mes pieds dans la terre et je les ai regardé.

- Bon je pense que je vais te laisser à ta méditation alors.

J'avais décider de partir, je devais surement le déranger plus qu'autre chose. Il avait déclaré le cimetière comme " son espace de méditation ", rien de surprenant pour une entité macabre. J'ai déterré mes pieds puis je suis repartie vers mon banc de pierre quelques mètres plus loin.

Je repris place sur ma pierre, le regard vide sur le sol. Des bruits de pas se firent entendre. Aux aguets, je relève la tête et devant moi se trouvait un jeune homme qui ne m'était pas inconnu. Il me semble l'avoir déjà aperçu dans l'académie. Légèrement méfiante je le toise inexpressive.

- Je m'appelle Ryan, enchanté de faire ta connaissance Meiga. Tu te demandes peut être pourquoi j'ai reconnu ta race? C'est simple, à ton odeur.

Ma première pensée a était " Je pus c'est ça ? ", je souris de ma bêtise. Puis je compris enfin que la Faucheuse rencontrée précédemment ne faisait qu'un avec ce curieux personnage. Il s’appelait donc Ryan ? Je saurais m'en souvenir. Le jeune homme s'étira et vint s'asseoir à mes cotés avant de me demander une seconde fois la raison de ma présence ici. Je me souviens avoir lâché un soupir avant de répondre d'un ton las.

- J'aime me balader la nuit. C'est calme et reposant. Et toi ?

Je me suis retournée vers mon interlocuteur mais celui ci observait le ciel. Je l'ai alors regardé à mon tour en essayant de distinguer les constellations que je connaissais.

Le ciel me paraissait bien sombre malgré la pleine lune. J'entendis Ryan à coté de moi s'étendre et chantonner. L'air se rafraîchissait de minute en minute et mes mains commençaient à vraiment s'engourdir.

- Je pense que je vais ren ... trer.

C'est en tournant la tête que je vis que mon interlocuteur était aux abonnés absents. Je suis restée là, hébétée. Quelle idiote, bien sur qu'il ne resterait pas, je ne suis surement pas de compagnie bien plaisante. Dans un soupir je me suis relevée et mes pieds ont commençaient à entamer une longue marche vers l'internat. Seulement, à ma première enjambé, j'ai entendu un grognement. Je me suis précipitamment retournée, un immense loup me faisait face. J'ai reculé doucement de un pas, deux pas ... Trop tard, le loup m'avait violemment poussé à terre et me dominait. J'ai poussé un cri de surprise puis je ne suis figée. Les yeux jaunes du loup me toisaient férocement. Que faire à présent ?
C'est alors que je vis apparaître la Faucheuse. En voyant sa faux, je compris. J'ai fermé mes yeux. La masse du loup s'est allégée, un liquide chaud s'est répandu sur moi. Le loup était mort.

- Merci ... murmurais-je d'une petite voix toujours les yeux clos.

Ryan observa la fille tremblante au sol et il reprit sa forme originelle, il s'accroupis, poussa le cadavre lupin et releva la fille avec fermeté mais sans la brusquer.
Il lui essuya le sang du visage et la prit par l'épaule.

"-Je te ramène chez toi, il faut te laver tout ce sang..."

Il la sentait tremblante, apeurée.

"-Ecoute, c'était lui ou toi...je pense avoir fait le bon choix."

Il sortaient du cimetière et s’engageaient dans la ruelle sous les lumières des lampadaires.

Ryan m'avait relevé. Il me parlait mais je n'arrivais pas écouter et à le comprendre. Ses mots semblaient être devenu un brouhaha incompréhensible. Nous avons fait quelques pas ensemble. Je suis restée longtemps silencieuse dans la nuit. Enfin j'ai respiré un bon coup puis je suis redevenue maître de mon esprit.

- Ce loup ... Je ... Merci. me suis-je simplement contentée de bégayer.

Nous nous sommes aventurés dans les ruelles sombres de la nuit avec seulement une poignée de lampadaire pour les éclairer. Le béton rappait mes pieds mais qu'est ce que j'en avais réellement à faire ? Les derniers évènements me trottaient encore en tête. Quelque chose n'allait pas. Mon cerveau se mit à fonctionner à toute vitesse. Quand je compris enfin ce qui clochait, je me suis brusquement retournée vers Ryan en manquant de le faire tomber au passage.

- Tu n'es pas un élève normal n'est ce pas ? Je veux dire ... en dehors de la Faucheuse qui habite en toi, tu as des compétences au combat accru, c'est peu commun. Je suis...

Je me suis finalement arrêtée de parler. Après tout cela ne me regardais en rien, c'est vrai. Il a bien le droit ne mener sa vie, pourquoi m'en mêler ? Je me suis alors mise à bafouiller des excuses et à repartir en regardant le sol, gênée.

J'acquiesce, silencieuse, et saisis les objets donnés par le jeune homme. Je l'en remercie avant de me débarbouiller le visage avec le chiffon humide. A la fin, il était entièrement taché de sang. J'ai rangé le bout de tissus dans ma besace en me promettant de le laver ultérieurement afin de lui rendre puis je lui tendis la bouteille contenant un fond d'eau restante.

- Vraiment, merci pour tout. déclarais je.

J'étais terriblement gênée. Si je n'avais pas fait cette foutue insomnie, rien de tout cela ne serait arrivé. J'en avais presque honte.

- Tu n'es pas blessé au moins ? me suis je alors inquiétée. Si c'est le cas, j'ai toujours des pansements et des bandages.

J'ai alors sortie le tout de mon sac en inspectant les parties du corps visible de Ryan pour y déceler une quelconque coupure ou ecchymose.

(hors r.p : Désolée pour ce court rp, pas d'inspi' TT.TT )

- Tu as surement raison. dis-je en rangeant mon matos dans mon sac.

Ryan se releva et alla se chercher une vodka avant de me mettre en garde.

-La prochaine fois, prends de quoi te défendre si tu te ballades seule la nuit...

- Oui j'y penserai ... Dis ? Je peux avoir de la vodka aussi ? Je pense que je vais en avoir besoin pour ce soir ...

J'avais vraiment l'esprit en vrac. Depuis quand le cimetière est un endroit dangereux ? ... Non finalement cette question aussi n'a aucun sens. Je me suis assise sur le divan puis j'ai poser mon regard dans le vague.

Ryan me la refusé en déclarant que ce n'était pas de mon age. Meme si je le savais, j'étais un peu déçue.

- Vas te coucher...si t'as besoin d'autre chose, chambre 303.

J'ai alors secoué la tête puis je suis repartie dans ma chambre : la 305. Je me suis allongée de tout mon long sur mon matelas, les yeux clos j'ai commencé à méditer. Mon réveil indiquait 03h28. Il me fallait vraiment dormir. Seulement, avant même de savoir où j'étais, je toquais timidement à la porte 303.

- Je peux entrer ? demandais-je d'une petite voix.

Je ne suis vraiment qu'une idiote, je ferai mieux de la laisser.

Je pris la canette en fixant le sol, gênée.

- Merci. Pour être honnête je ne veux rien de particulier. Je n'arrive pas à dormir.

Je devais avoir l'air bien stupide. Je bu une gorgée de la boisson gazeuse un pincement au coeur puis je me mis à balayer la salle du regard. La chambre de mon hôte était vraiment sombre, avec pour seule source de lumière, des écrans d'ordinateurs. Ce doit être quelqu'un de plutôt solitaire.

- Si je t’embête, dis le franchement. Je m'en voudrais de t'ennuyer. déclarais je enfin.

Ryan déclara que pour insomnies il n'y pouvait rien et je le savais. Mais si je dois rester éveillée autant que ce soit avec quelqu'un plutôt que toute seule dans mon lit en fixant le plafond avec des questions du style " Qui est venu en premier ? L'oeuf ou la poule ? ". Non, je pense être bien mieux ici, puis, si je n'étais pas une gêne, autant se tenir compagnie mutuellement. Il me sortie brusquement de mes drôles de pensées en jetant sa cannette vide et en venant s'asseoir à mes cotés.

- C'est le loup qui te perturbe ?

Je secoue la tête en signe de désaccord.

- Non ce n'est pas vraiment ça, quelques nuits je suis dans l'incapacité de dormir. Je suppose que c'est le passé qui vient me hanter.

C'est alors, en regardant autour de moi, que je remarque la main squelettique du jeune homme. Je m’apprêtais à la saisir pour l'observer mais je me suis revissée, jugeant cela impoli. Je me suis alors contentée de la regarder en coin.

- C'est douloureux ? ne pus-je m’empêcher de demander.

Il me demanda alors si mon passé était douloureux. Je me mis a y réfléchir. Finalement je secoue une seconde fois la tete.

- Non, seulement triste. La douleur est partie avec les larmes petit à petit.

Pour arrêter de plomber l'ambiance, j'ai bu une nouvelle fois du soda. Il était acide mais je ne m’arrêtais pas pour autant. Le passé ... Pourquoi ne pouvons nous pas l'oublier ?

- Et toi ? Tu as une histoire à raconter ? finis-je finalement par demander pour briser le silence.

- Nos sujets sont très joyeux je trouve...

Pour la première fois, depuis longtemps, je souris. Il avait tout à fait raison. Quand j'eus fini de boire ma cannette je me suis levée pour la jeter puis je suis revenue m'asseoir à ses cotés.

- Certes, mais il ne faut jamais oublier le passé.

Jugeant mes propos plutôt barbant, je me suis tut puis je suis repartie regarder par la petite fenetre de la chambre.

- On peut voir mars ce soir, c'est vraiment beau non ?